mardi, novembre 23, 2004

 

Surjudiciarisés

Même si j’en avais eu vent avant d’atterir ici, le recours systématique aux moyens judiciaires , sport national américain devant le base-ball, le football et derrière le triathlon TV/pizza/Bud, a des implications dans la vie de tous les jours que je n’aurais pas su prévoir. Plus que les anecdotes qui ont traverse l’atlantique ( la mention déconseillant de faire sécher son animal domestique dans le micro-onde, l’indication écrite sur chaque rétroviseur de ma voiture « Les objets apparaissant dans ce miroir peuvent paraître plus éloignes qu’ils ne le sont vraiment »), cette fâcheuse habitude a en effet changé la vie des entreprises et même les relations inter-personnelles. Ainsi dès mon arrivée, je suis entré en possession de mon passeport QHSE, pour Qualité, Hygiène et Sécurité, qui spécifie l’ensemble des formations que je dois suivre pour ma sécurité dans le cadre professionnel. Les formations sont nombreuses (au moins 5 jours pleins chaque année), très diverses et obligatoires. Voici quelques titres choisis : 5 bonnes attitudes pour conduire prudemment, une attitude irréprochable au bureau (Halte au Harcèlement sexuel , et croyez moi la définition est plutôt large ici), soulever, marcher, monter et descendre les escaliers…On disait la culture américaine explicite, croyez moi elle l’est. Le fait est que, si vous tombez malencontreusement dans l’escalier du building de votre entreprise ( mais quelle idée de prendre l’escalier, vous ne pouvez pas attendre un des 24 ascenseurs patiemment ?), vous pouvez vous retourner contre cette dernière arguant de tous les prétextes fallacieux possibles : la longueur ou l’épaisseur des marches n’est pas conforme, une marche est dégradée (même légèrement) , l’escalier n’ est pas assez éclairé…et demander 10 millions de dollars (en fonction du désagrément subi). Mais si vous avez suivi cette formation sur l’art de descendre les escaliers prudemment, l’entreprise pourra essayer de prouver que vous avez consciemment essayé de violer une des règles de l’entreprise en descendant ces escaliers trop rapidement ou en portant une mallette non réglementaire ou avec des chaussures mal lacées….et même vous licencier pour une de ces raisons. Ainsi, une des règles de conduite automobile édictée est « don’t back, don’t back, do not back » … si par malheur vous avez un accident en reculant , même le week end, vous risquez de prendre la porte pour « policy violation » ou au minimum de prendre un blâme. Difficile à avaler venant de France ou la simple évocation d’une règle ferme et écrite nous donne immédiatement une crise d’urticaire. Surtout si elle est relative à notre comportement.
Les avocats, véritables pousse-au-crime, ont un rôle majeur dans cette histoire. En effet ils sont rémunères au pourcentage des dommages et intérêts versés à leurs clients (joli concept non ?). Un de nos amis, récemment implique dans un accident de la route, a reçu cinq appels d’avocats lui conseillant de porter plainte contre le responsable et d’aller consulter médecins et kinésithérapeutes qui ne manqueront pas de verser des pièces utiles au dossier. Les avocats ont en effet directement accès aux comptes-rendus des accidents effectués par la police et appellent ainsi systématiquement les victimes pour les inviter joyeusement a une partie de monopoly au tribunal. Cette pratique est néanmoins considérée assez « bas de gamme » par les Américains eux-mêmes. Et nombre d’entre eux se refusent à jouer ce jeu. Pour les autres, c’est une sorte de loterie, qui peut rapporter des millions de dollars … et dont le ticket est mutualise par le biais du prix exorbitant des assurances – dites parapluies - qu’il nous faut souscrire pour ce protéger contre ce genre d’action à notre encontre.

Mais ne vous inquiétez pas la France n'est pas loin derrière sur ce terrain...

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